La Fédération béninoise d’athlétisme se projette au-delà de la COVID-19

En juin, le Comité olympique et sportif béninois a nommé la Fédération béninoise d’athlétisme deuxième meilleure organisation sportive du Bénin, pays d’Afrique de l’Ouest.

Cette distinction s’accompagnait d’un chèque d’un montant de 4,5 millions de francs CFA (environ 8 130 dollars américains). À la demande de la fédération, cette somme a été transposée en équipement d’athlétisme dont elle avait grand besoin, et remis rapidement aux clubs locaux d’athlétisme.

 

« Depuis que l’actuel bureau exécutif a pris en charge la gestion de la fédération, une stratégie de développement a été mise en place immédiatement », explique M. Achille Aihou, Secrétaire général de la fédération.

« Ce plan prévoyait des mesures à tous les niveaux, y compris la formation des entraîneurs et des athlètes ainsi que l’organisation de compétitions régulières pour l’entraînement de tous les groupes d’âge. Nous nous sommes concentrés sur une gestion administrative basée sur la performance avec des indicateurs clairs. Nous avons également mis en œuvre une infrastructure d’information et de communication. »

« L’ensemble de ces initiatives nous a valu l’admiration du Comité olympique et sportif. »

Les responsables de l’athlétisme au Bénin sont particulièrement fiers de leur médaille d’argent, notamment grâce au travail acharné qu’ils ont accompli malgré les difficultés rencontrées.

« La première difficulté est d’ordre financier », explique Novignon Okry, le directeur chargé de l’organisation de la fédération. « Il est vrai que le gouvernement a placé notre sport parmi les cinq premiers sports qui bénéficient de l’attention gouvernementale et de son plan d’action. Cependant, le niveau du sport au Bénin est généralement faible et le partenariat avec des sponsors est un concept encore peu développé. Il est donc difficile de récolter des fonds auprès d’autres sources. »

Faire face aux préjugés culturels

Un autre défi auquel la fédération est souvent confrontée est de nature culturelle, le sport en général n’étant pas considéré comme une voie professionnelle viable. Les enfants sont souvent fortement découragés de poursuivre une carrière sportive.

« C’est pire encore pour les femmes, même si les plus grands athlètes du Bénin sont des femmes », déclare Novignon Okry. « Pour la plupart d’entre elles, lorsqu’elles se lancent dans l’athlétisme, certaines pratiques culturelles les obligent à abandonner trop tôt cette activité. »

La sprinteuse béninoise Beatrice Midomide sait exactement ce que cela signifie. Elle fait partie des quatre athlètes du Bénin à s’entraîner au Centre de développement africain de l’athlétisme situé à Lomé, au Togo.

« J’étais dans ma cinquième année d’école primaire lorsque j’ai découvert l’athlétisme », explique-t-elle. « Malheureusement, mes parents n’étaient pas d’accord à cause des risques d’aller en ville pour s’entraîner au stade. »

Outre les questions de sécurité, les parents de Beatrice Midomide craignaient les effets sur son comportement. Il lui a fallu beaucoup de détermination pour continuer à s’investir en athlétisme.

« Un jour, j’ai volé de l’argent à mon père pour aller m’entraîner en ville. À mon retour, mes parents m’ont sévèrement punie, mais cette situation n’a jamais freiné mon envie et j’ai continué de sortir pour m’entraîner. »

« Finalement, mes parents ont compris que c’était une vraie passion. Par amour pour moi, ils ont décidé de m’autoriser à faire de l’athlétisme. »

Beatrice Midomide s’est révélée suffisamment bonne pour rejoindre l’équipe béninoise d’athlétisme en 2013 et depuis lors, elle a représenté le Bénin dans plusieurs compétitions continentales. Cependant, de nombreuses histoires similaires prennent souvent une autre tournure. Des athlètes prometteurs renoncent tout simplement au sport. Pourtant, les responsables de l’athlétisme au Bénin font de leur mieux pour inverser la tendance. Le fait que l’athlétisme gagne en popularité est une bonne chose.

« Il suffit de regarder le taux de participation aux courses sur route que nous organisons pour comprendre à quel point les gens sont intéressés », souligne Achille Aihou. « L’athlétisme est une discipline assez prisée qui gagne en popularité grâce aux résultats enregistrés par les athlètes béninois dans les compétitions de la sous-région et de l’Afrique dans son ensemble. »

Parmi ces athlètes figurent Noélie Yarigo, coureuse de demi-fond, et Odile Ahouanwanou, la championne d’Afrique de l’heptathlon, qui a établi un record national l’année dernière aux Championnats du monde à Doha.

« Derrière le football, qui tient une place importante dans de nombreux pays d’Afrique, l’athlétisme est la discipline sportive la plus enseignée dans les écoles et les collèges du territoire béninois. Il en découle que chaque année, des générations de jeunes gens s’initient à ce sport et c’est toujours une bonne chose. »

L’avenir de l’athlétisme béninois

La fédération d’athlétisme avait prévu de grands projets en 2020, y compris la tenue de compétitions nationales régulières pour tous les groupes d’âge ainsi que l’introduction récente de championnats dans les ligues locales. Ces compétitions ont toutefois été mises en suspens lorsque la pandémie a sévi dans le pays. 

« La COVID-19 a bouleversé les plans et continue d’affecter l’athlétisme et d’autres sports au Bénin », explique Achille Aihou. « Nous avions planifié toutes les manifestations sportives du calendrier habituel, les championnats et autres compétitions mais nous n’avons pas réussi à les organiser. »Depuis le mois de mars, nous avons plusieurs fois différé l’ensemble de notre programme. Cette décision a été prise dans le but de sauver des vies. Nous n’avions pas vraiment le choix.

« Les mesures gouvernementales ont marqué l’arrêt des événements sportifs et la fermeture des stades, ce qui a bien sûr interrompu l’organisation de l’entraînement des athlètes. Il y a également un manque de financement, juste une morosité ambiante et un grand vide dans le programme d’activité de la fédération. »

Il est envisagé de reprendre les compétitions mais cela dépendra de la levée par le gouvernement béninois des mesures de restriction visant les sports et les rassemblements. Lorsqu’il sera possible de reprendre les activités en toute sécurité, la fédération sera prête à passer à l’action.

« Nous voulons développer la pratique de l’athlétisme dans toutes les communes du pays et nous encourageons la création de clubs professionnels », explique Achille Aihou. « Dans cette optique, le gouvernement béninois a initié dans son plan d’action la redynamisation et la restructuration de quelque sept disciplines sportives dans le pays, dont l’athlétisme. Cela nous a permis de faire intervenir au moins un entraîneur dans chaque commune du pays, rémunéré par l’État et chargé du suivi des jeunes athlètes, notamment dans les écoles et les structures de quartiers. »

« Nous sommes actuellement en voie de former des officiels afin de pouvoir bénéficier des services de personnes qualifiées dans le pays. Nous allons créer des partenariats avec des écoles primaires afin de renforcer la place de l’athlétisme chez les plus jeunes. »

Aucun sportif béninois pratiquant l’athlétisme n’a jamais remporté de médaille aux Jeux olympiques ou aux Championnats du monde d’athlétisme. Les responsables de l’athlétisme au Bénin travaillent d’arrache-pied pour y remédier dans les années à venir.

Helen Ngoh pour World Athletics